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> Services funéraire

 

"Je suis convaincu qu'il faut remettre la mort au centre de la vie, non pas pour être morbide mais pour prendre conscience de notre caractère mortel, pour devenir pleinement jouissifs. Ce combat peut politiquement prendre déjà deux formes : le combat pour le droit de mourir dans la dignité et celui pour la gratuité des services funéraires. Soyons égaux devant la mort, nous aurons plus de chance de l'être dans la vie" (Paul Ariès)

 

 

Un territoire pilote : Mouans Sartoux


Une ville, des services publics

André Aschieri

in Le sarkophage


Commune située à la périphérie de Cannes et de Grasse, Mouans-Sartoux compte 10 000 habitants. Jusqu'à la fin des années 1960, c'était un petit bourg rural essentiellement paysan destiné à devenir une cité-dortoir de ses puissantes voisines. C'est aussi à cette époque que de grands groupes industriels se constituèrent pour partir à L'assaut des services publics gérés par tes communes. Si leurs cibles privilégiées étaient les grandes villes, ils ne dédaignaient pas Les villages. Comme on va Le voir, L'intérêt qu'ils leurs portent est souvent inversement proportionnel à La considération dont ils font preuve à l'égard de leurs élus.
L'histoire des services publics à Mouans-Sartoux peut s'illustrer grâce à deux anecdotes. 

Histoire d'eau...
La première histoire concerne la création de la régie municipale des eaux. Après avoir conduit avec succès la bataille des paysans de Mouans contre des projets d'urbanisation démesurés portés par des promoteurs immobiliers soutenus par l'État et l'ancienne municipalité, je me retrouvai jeune élu, adjoint au maire, J'étais passionné de sports et je n'étais pas convaincu de mon utilité au sein du conseil municipal. jusqu'à cc que le maire nous annonce que la Lyonnaise des Eaux nous proposait de reprendre, dans le cadre d'une délégation, la gestion de toute l'eau communale. Les caractéristiques géographiques de la commune faisaient que la Lyonnaise assurait déjà la desserte des quartiers excentrés. Devant l'insistance de la société privée, sa gourmandise impossible à dissimuler, j'ai dit au maire ma réticence à leur concéder la gestion de notre ressource. 11 s'est fâché, s'est emporté, puis croyant clore le débat a laissé tomber: « Si tu veux que nous gérions l'eau en régie, à toi de t'en occuper. » Il pensait me décourager. Gérer l'eau, alimenter toute une population, même de quelques milliers d'habitants, avec une eau de qualité sanitaire irréprochable, 24 heures sur 24, c'est une responsabilité considérable. Il peut être pénalement et personnellement mis en cause à la moindre défaillance. Pourtant, cette provocation a eu l'effet inverse de celui escompté_ Non seulement j'acceptai de m'occuper du service de l'eau, mais je demandai au conseil municipal de prendre à notre compte la desserte des quartiers jusqu'alors alimentés par la société privée. Inutile de décrire l'enthousiasme avec lequel le concessionnaire a abandonné la partie. Il suffira de préciser que le pan-on de l'époque s'est présenté en mairie, a déposé une clef sur le bureau du maire et s'en est allé. Aucune explication, pas le moindre plan de réseau remis. Rien C'est ainsi que j'ai été confronté à l'un des défis les plus passionnant de ma vie. Prof de maths le jour, je passais des nuits entières, assisté par un cantonnier du village, à repérer toutes les canalisations du territoire. La nuit, parce que le silence nocturne permet seul de percevoir le bruit de l'eau filant dans les tuyaux, et parce que les coupures provoquées ne gênaient pas les habitants endormis_ Ouvrir et fermer vanne après vanne, écouter, reporter sur un plan. Des mois durant, nous avons sillonné les chemins. L'autre défi de l'eau était d'assurer sa qualité. À l'époque, pas d'unité de traite-ment télégérée, pas de système sophistiqué une source, un point de captage et un goutte-à-goutte de chlore à réglage manuel. En fonction des aléas de la météo, orages, sécheresse, il fallait modifier le réglage de la quantité d'eau de javel à injecter. Sans compter toutes les fois où le dispositif se modifiait de lui-même. Là encore, il me revenait de surveiller la source et la qualité de son eau. Aujourd'hui> la régie municipale des eaux compte plus de 4800 abonnés et utilise les moyens de traitement (microfiltration), distribution, de gestion les plus performants. Le prix du mètre cube, assainisse-ment compris, est inférieur aux prix pratiqués par les grands groupes, il est surtout progressif, c'est-à-dire qu'il pénalise les gras consommateurs. Nous examinons les conditions qui permettraient de rendre « gratuits » les 40 litres par jour nécessaires à la satisfaction des besoins vitaux de chaque personne. Depuis 10 ans, sans attendre la loi Ondin, la commune prélève 1%, du chiffre d'affaires de la régie pour financer des projets d'accès à l'eau pour les populations qui en sont dépourvues dans le cadre d'actions portées par une dizaine d'associations humanitaires locales.


Tous égaux devant... la mort ! 
La seconde histoire est tout aussi révélatrice des drôles de pratiques qui étaient en cours dans certains domaines de la vie publique. La commune assurait, comme tous les villages à cette époque, le service funéraire des enterrements. Durant des années, plus de dix ans sûre-ment, je trouvais sur mon bureau à la mai-rie, au moment de Pâques, un oeuf en chocolat, Cette délicate attention émanait du responsable d'une entreprise privée de pompes funèbres. Avait-il imaginé toucher une corde sensible pour nous amener à concéder ce service? Mon goût pour le chocolat en balance avec mon attache-ment au service public! Quel dilemme ! La lutte intérieure fut moins âpre qu'on ne l'imagine, je renonçai à l'oeuf. Non seulement la régie municipale des pompes funèbres allait le rester, mais le service des obsèques serait désormais gratuit pour la population. Cette gratuité est restée effective jusqu'à la loi Sueur de 1993. Cette loi, tout en mettant fin au monopole communal, revenait à interdire aux communes — au nom de la concurrence avec les sociétés privées — de rendre gratuite-ment un service produit par d'autres à titre onéreux. Nous avons décidé, avec le conseil municipal, de résister à cette atteinte grave au service public en décidant que le service des pompes funèbres assuré par la commune serait facturé l'euro symbolique aux familles. C'est toujours le cas aujourd'hui.

Mouans-Sartoux aujourd'hui c'est un ensemble de services publics en régie municipale :

  1. l'eau, 
  2. l'assainissement, 
  3. la collecte des ordures ménagères, 
  4. les pompes funèbres, 
  5. la restauration scolaire, 
  6. le transport scolaire et associatif 
  7. et la dernière-née des régies : la régie municipale de production agricole. 

Cette action a été possible grâce à l'acquisition d'une propriété de quatre hectares tout près du centre ville. Mise en place au printemps 2010, elle a un double objectif: encourager la reconquête du foncier agricole en zone urbaine et périurbaine, et augmenter la part de pro-duits bit) servis dans les repas des cantines scolaires. Cette part représentait déjà plus de 50 % à Mouans-Sartoux.

 

 

Pour aller plus loin

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D'autres combats...

Face à une société qui ne reconnait plus le droit à être malade...

Pour vieillir autrement.... 

 

 

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